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Définition et enjeux de la CSRD pour les entreprises

A une époque où la transition écologique et la responsabilité sociale des entreprises sont devenues des enjeux cruciaux, une nouvelle directive européenne entre en application le 1er janvier 2024 : la CSRD. Véritable bouleversement dans le paysage du reporting extra-financier, elle vise à mettre en lumière les engagements et les performances des entreprises en matière de développement durable. Mais qu'est-ce que la CSRD ? Pourquoi est-elle si importante ? Et surtout, comment va-t-elle impacter la stratégie des entreprises en Europe ? Découvrez les règles de cette directive qui promet de redéfinir les contours du reporting de durabilité.

Alban Péan
Alban Péan
Directeur Marketing et Communication
Le
29/10/2023
CSRD 2024

Qu’est ce que la directive CSRD ?

La Corporate Sustainability Reporting Directive, plus communément appelée CSRD, est une directive européenne qui vise à renforcer et harmoniser le reporting extra-financier des entreprises. Cette évolution majeure de la réglementation européenne vise à renforcer la transparence des entreprises en matière de développement durable et à harmoniser les pratiques de reporting de durabilité en Europe.

Pourquoi la CSRD a-t-elle été créée ?

La CSRD est le fruit d'une prise de conscience croissante de l'importance de la durabilité et de la responsabilité sociale des entreprises dans le contexte économique actuel.

Le Green Deal Européen, lancé en 2019, est une initiative audacieuse qui vise à positionner l'Europe à l'avant-garde de la lutte contre le changement climatique. L'objectif majeur est de faire de l’UE le premier continent neutre en carbone d’ici 2050. La CSRD est un des moyens permettant d'atteindre cet objectif ambitieux.

🚨 Remarque
Le reporting de durabilité n'est pas nouveau. Depuis 2014, la directive NFRD (Non Financial Reporting Directive) encadrait la DPEF (Déclaration de Performance Extra-Financière) des entreprises implantées dans l'UE mais la Commission européenne a décidé d’effectuer une refonte du texte afin d’harmoniser et renforcer la réglementation en matière de reporting extra-financier.

A partir de 2024, la directive CSRD va donc remplacer la directive NFRD en modifiant quatre textes en vigueur :

  1. La directive Comptable,
  2. La directive Transparence,
  3. La directive Audit,
  4. Le règlement Audit.

Avec cette nouvelle réglementation, l'Union européenne espère que la notation extra-financière sera davantage valorisée par les investisseurs, soutenant ainsi l'essor de la finance durable.

"A terme, les nouvelles règles de la CSRD visent à mettre les rapports de durabilité sur un pied d’égalité avec les rapports financiers"

auteur Commission européenne

De nouvelles obligations en 2024

La CSRD exige des entreprises des données plus précises et standardisées. Elle introduit le principe de double matérialité, obligeant les entreprises à évaluer l'impact de leurs activités vis-à-vis des enjeux RSE (Environnement, Social, Économie et Gouvernance).

En effet, la directive CSRD a prévu la création de normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) dédiées au reporting de durabilité. C'est l'EFRAG, le groupe consultatif européen dédié à l'information financière, qui a été désigné pour élaborer ces normes en détail. La Commission a d'ores et déjà validé les 12 premières normes ESRS le 31 juillet 2023.

CSRD principes généraux
🚨 Remarque

De nouvelles normes ESRS, dont la portée varie, seront adoptées prochainement. On y trouve :

  • Les normes dites « universelles », qui s'adressent à toutes les entreprises, indépendamment de leur domaine d'activité. Elles englobent des sujets transversaux et couvrent l'ensemble des problématiques socio-environnementales.
  • Les normes sectorielles, qui sont spécifiques à chaque secteur d'activité
  • Les normes dédiées aux PME cotées sur les marchés officiels

La directive CSRD opère plusieurs changements importants par rapport à la directive NFRD :

  1. Harmonisation des obligations de reporting : grâce aux normes ESRS, les entreprises sont tenues de fournir des informations détaillées concernant leurs opportunités, risques et impacts matériels relatifs aux domaines social, environnemental et de gouvernance. Ceci est basé sur le concept de « double matérialité », associant les performances financières et environnementales.
  2. Élargissement du champ d'application : les nouvelles règles en matière de reporting extra-financier concernent un plus grand nombre d’entreprises. Avec l'inclusion des PME cotées et des entreprises non-européennes réalisant un chiffre d'affaires significatif dans l'UE, la portée de la CSRD est bien plus vaste que celle de la directive NFRD précédente (voir plus bas).
  3. Contrôle renforcé : un audit des informations fournies est obligatoire, réalisé soit par un commissaire aux comptes, soit par un organisme indépendant (selon le choix des États).
  4. Un nouveau format de rapport : le reporting de durabilité est désormais inclus dans une section dédiée du rapport de gestion et ce dernier doit être publié dans un format électronique européen standardisé (xHTML).

La CSRD est donc une étape majeure vers une plus grande transparence et une plus grande responsabilité des entreprises en matière de développement durable. La directive vise à fournir aux parties prenantes les informations dont elles ont besoin pour évaluer les performances ESG (Environmental, Social and Governance) des entreprises, de manière objective et comparée. 

A charge pour les entreprises concernées de s'adapter à ces nouvelles exigences et de veiller à ce que leurs rapports extra-financiers soient à la fois précis et représentatifs de leurs performances en matière de durabilité.

Quelles entreprises sont concernées ?

Auparavant, environ 10 000 entreprises étaient concernées par le reporting de durabilité. Ce chiffre pourrait désormais atteindre 50 000.

A partir de 2024, toutes les entreprises cotées sur les marchés réglementés européens, y compris les PME cotées, sont concernées par la directive CSRD.

Par ailleurs, les entreprises basées hors de l'UE, mais réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 150 millions d'euros au sein de l'Union européenne, seront également soumises à cette directive.

Enfin, les autres entreprises concernées par la CSRD sont celles qui répondent à au moins deux des trois critères suivants :

  1. Avoir réalisé un chiffre d'affaires de 40 millions d'euros ou plus.
  2. Avoir un bilan total de 20 millions d'euros ou plus.
  3. Employer au moins 250 salariés.

Calendrier d’entrée en vigueur de la directive CSRD

Calendrier de la CSRD

L’entrée en application de la directive CSRD s’effectuera en 4 temps.

A partir du 1er janvier 2025, les entreprises (européennes ou non) employant plus de 500 salariés et générant un chiffre d’affaire de plus de 40 millions d’euros ou ayant un total de bilan de plus de 20 millions d’euros, sont tenues de publier un rapport extra-financier sur l’exercice 2024.

A partir du 1er janvier 2026, les entreprises (européennes ou non) employant plus de 250 salariés, générant un chiffre d’affaire de plus de 40 millions d’euros et/ou ayant un total de bilan de plus de 20 millions d’euros (deux des trois critères précédents), sont tenues de publier un rapport extra-financier sur l’exercice 2025.

A partir du 1er janvier 2027, les entreprises (européennes ou non) cotées sur un marché réglementé européen, à l’exception des microentreprises, sont tenues de publier un rapport de durabilité sur l’exercice 2026.

Au sens de la CSRD, une microentreprise est une société qui ne dépasse pas deux des critères suivants :

  1. Employer 10 salariés,
  2. Générer 700 000 euros de chiffre d’affaires,
  3. Avoir un total de bilan de 250 000 euros.
🚨 Remarque
Durant une phase transitoire s'étendant jusqu'à 2028, les PME cotées peuvent choisir de ne pas se conformer aux exigences de reporting de la CSRD. Toutefois, elles doivent justifier de cette décision dans leur rapport de gestion.

A partir du 1er janvier 2029, les entreprises étrangères possédant une filiale ou une succursale au sein de l’UE et générant un chiffre d'affaires européen dépassant les 150 millions d’euros, sont tenues de respecter les exigences de la directive CSRD.

Conseils de préparation au nouveau reporting

Préparation du reporting de la CSRD

S’informer et se familiariser avec le principe de “double matérialité”

Avant tout, il est essentiel de bien comprendre ce que contient la CSRD et ce qu'elle va changer pour votre entreprise. Face au florilège de normes ESRS qui existent ou qui vont être votées en 2024, ce n’est pas une mince affaire…

Pour commencer, familiarisez-vous avec un des piliers de la CSRD : le principe de “double matérialité”. Il consiste à collecter les informations qui mettent en lumière l’impact du développement durable sur les performances économiques et financières de votre entreprise.

Cette analyse de matérialité est la première étape du rapport extra-financier imposé par la CSRD. Il est donc judicieux d'actualiser ou d'instaurer sans tarder votre méthode d'évaluation, en prenant en compte différents facteurs, comme la nature de vos activités, votre secteur d'intervention, vos interactions avec les parties prenantes, la définition des seuils de matérialité etc…

🚨 Remarque
Un guide dédié à "l'analyse de matérialité" est actuellement en préparation par l'EFRAG.

En vous plongeant dans cette analyse de double matérialité, vous pouvez mettre en évidence les principales préoccupations, opportunités et impacts ESG (Environmental, Social and Governance) liés à vos opérations et à l'ensemble de votre chaîne de valeur. Cette étude est essentielle pour dégager les indicateurs clés qui répondent aux normes ESRS.

Anticiper la préparation du rapport de durabilité

L’élaboration d’un rapport de durabilité est une analyse transversale de l’activité de votre entreprise. Même si certaines informations à publier sont facilement accessibles, certaines exigences de la CSRD n’ont jamais été rencontrées. Autrement dit, la préparation du rapport peut s’avérer fastidieuse… n’attendez donc pas la dernière minute !

Pour anticiper au mieux l’entrée en vigueur de la directive, vous pouvez commencer par élaborer un plan d'action capable de répondre aux nouvelles exigences de la CSRD. Ce plan vous permettra d’identifier les données qui ne sont pas encore disponibles, qu'elles concernent les activités internes à votre entreprise ou celles relatives à votre chaîne de valeur. Ce plan d'action permet d'adopter la bonne stratégie pour les collecter les informations nécessaires au reporting extra-financier et d’identifier les collaborateurs à impliquer à chaque phase du projet.

🚨 Remarque
Bien qu’une phase transitoire permet à certaines entreprises de s’abstenir des obligations de la CSRD jusqu’en 2028, il est judicieux de profiter de cette période pour définir et ajuster vos méthodes de collecte et de traitement des données afin d’être prêt à fournir les informations requises en temps voulu.

Faire appel à des experts

La directive CSRD impose notamment que le rapport de durabilité des entreprises soit examiné par un commissaire aux comptes ou par un organisme indépendant. Les premières années, cette vérification doit être réalisée de façon "modérée". Cependant, à partir de 2028, un contrôle "raisonnable" pourrait être exigé. 

Il est donc essentiel pour les entreprises d'avoir un système de contrôle interne solide et une gouvernance impliquée pour réussir la mise en place de la CSRD et le respect des ESRS. 

Ainsi, établir le plus tôt possible un canal de communication avec le commissaire aux comptes ou l’organisme indépendant chargé de la vérification peut s'avérer intéressant. C’est l’occasion d'exprimer vos préoccupations aux autorités responsables de la future vérification afin d’éviter de mauvaises surprises et de rectifier le tir suffisamment tôt, si besoin.

Par ailleurs, grâce à leur vision globale, ces experts peuvent vous aider à prioriser vos recherches. Par exemple, l’analyse de la chaîne de valeur, qui englobe tous les fournisseurs de l'entreprise, représente un travail conséquent. Bénéficier de bons conseils et d’un accompagnement régulier est un atout de taille qui ne peut vous être que profitable dans la préparation du reporting de durabilité imposé par la directive CSRD.